"> Idles - Ultra Mono - Indiepoprock

Ultra Mono


Un album de sorti en chez .

8

Troisième album pour le combo de Bristol, pas encore celui du polissage.

Après Protomartyr et Fontaines D.C en juillet, Idles complètent le trio des têtes déjà connues de la nouvelle vague post-punk dont on attendait impatiemment le nouvel album. Dans le cas du groupe de Bristol, l’enjeu était de savoir si, après deux albums, la troupe de Joe Talbot allait entrer dans une phase d’élargissement de sa palette après le radical « Brutalism » et le manifeste populaire « Joy As An Act Of Resistance ». En ce qui les concerne, ce sont, ne serait-ce qu’en partie, des circonstances extérieures qui auront donné une direction à « Ultra Mono ». Car, à notre époque, les idéologies politiques ne sont plus très claires, au point que des gens qu’on aurait spontanément rangé sous la même bannière en viennent à se quereller. Idles, en effet, n’ont jamais caché leur aversion pour les partisans du Brexit, les racistes, les homophobes de tout poil et les ultralibéraux. Mais voilà que des groupes comme Fat White Family ou Sleaford Mods, qui portent eux aussi des messages radicaux, ont pourtant, via la voix de leurs leaders respectifs, accusé Idles de démagogie en jouant aux bien-pensants qui s’approprient la voix des classes populaires, dont ils ne sont pas issus. Un débat qui ne manque pas d’intérêt et révèle intrinsèquement l’état de division de l’Angleterre en 2020. Toujours est-il, pour en revenir à la musique, que cette polémique est, indirectement, au coeur d »Ultra Mono ».

Piqués au vif par les accusations dont ils ont été l’objet, Talbot et consorts ont décidé d’y apporter une réponse cinglante qui n’y va pas par quatre chemins. Conséquence, « Ultra Mono » est encore plus direct et tranchant que ses prédécesseurs. Les lignes de guitare de Mark Bowen et Lee Kiernan sont concises, minimalistes et répétitives, les frappes de Jon Beavis lourdes et métronomiques et Joe Talbot rugit plus que jamais. Sur le fond du propos, l’album enfonce le clou tout en marquant une inflexion. Car le groupe est habité par la volonté d’assumer ses prises de position, sans esquiver les critiques. Dès l’introductif War, le groupe dénonce une guerre des classes dont les plus modestes sont victimes. Mais si Idles prennent le parti de la « working-class », et c’est là que le changement d’époque est le plus évident, pas question pour eux de tomber dans une démarche partisane qui les verrait tout passer aux plus modestes et tout mettre sur le dos des plus aisés. Model Village, le single envoyé en éclaireur, pourfend le repli identitaire à l’origine du vote sur le Brexit, dénonce le racisme latent qui inonde la société, toutes classes confondues. En guise de réponse à ceux qui ne supportent pas que Joe Talbot dise aux classes populaires comment se comporter sans en être lui-même issu tout en prenant leur parti, Carcinogenic revendique un droit à penser, à rejeter le racisme et les inégalités sociales tout en assumant d’avoir grandi au sein de la classe moyenne.

Alors on peut s’agacer de ce manifeste qui peut parfois sembler moralisateur et oscille entre engagement et auto-justification. Mais ce qui tient le plus à coeur d’Idles, c’est qu’on les prenne pour ce qu’ils sont vraiment, et asséner des messages bruts et francs ne passe pas par la douceur et les rodomontades. Mais « Ultra Mono » n’est pas une simple répétition de « Brutalism » en version plus aride. Autre aspect du changement d’époque, qu’on a déjà mis en exergue pour d’autres, si Idles, dans leurs influences, comptent certainement The Fall ou Joy Division, ils n’en ont pas moins grandi avec davantage de hip-hop, genre musical dominant depuis une quinzaine d’années, en fond sonore, que de rock pur et dur. Et « Ultra Mono », dans sa concision, emprunte au hip-hop le plus revendicatif ses rythmes syncopés, ses boucles, Joe Talbot fait de son chant rugissant un flow implacable. Aux polémiques qui s’étalent dans la presse, Idles ont choisi de de répondre par leur art. La démarche est plus que louable, le résultat pour le moins efficace.

Rédacteur en chef

Tracklist

  1. War
  2. Grounds
  3. Mr. Motivator
  4. Anxiety
  5. Kill Them With Kindness
  6. Model Village
  7. Ne Touche Pas Moi
  8. Carcinogenic
  9. Reigns
  10. The Lover
  11. A Hymn
  12. Danke

La disco de Idles

Tangk7
70%

Tangk

Crawler9
90%

Crawler

Ultra Mono8
80%

Ultra Mono

Joy As An Act Of Resistance9
90%