Kim Gordon

Second album solo de Kim Gordon, toujours radicale, toujours en mouvement.

Commençons par évacuer rapidement la question de l’âge. Oui, Kim Gordon affiche 70 printemps, et fait partie de ces artistes qui ne larguent jamais les amarres, restent sans cesse en mouvement, continuent envers et contre tout à s’intéresser à la création en général et ne considèrent pas avoir appartenu à un quelconque âge d’or ou, pire encore, que c’était mieux avant.

De fait, pas forcément par nostalgie mais plutôt par attachement, on s’était finalement jusque-là quelque peu tenus à distance des travaux en solo des ex Sonic Youth dans leur ensemble. Mais bien sûr pas suffisamment non plus pour ne pas avoir une oreille qui traînait pour eux. Et « The Collective » a tout pour nous inciter à plonger dans l’album à pieds joints. Car sur ce disque, Kim Gordon ne renie pas son ADN, bien au contraire, mais fait preuve à la fois de constance et d’adaptation.

D’emblée, « The Collective » s’affirme donc comme un disque rugueux, aux angles abrupts, sur lequel Kim Gordon pose sa voix cyanurée, en mode spoken word plutôt que chant, sur des textures sonores triturées à souhait. Rien de nouveau ? Effectivement, ça, c’est pour la constance. Mais, cette fois, à la place des guitares saturées, on a droit à un canevas sonore aux rythmiques digitales implacables tout droit sorties de la trap qui entrent en collision avec des riffs industriels à la puissance dévastatrice.

Du début à la fin, ce cocktail est implacable et totalement addictif. Et Kim Gordon parvient quasiment à démarrer en mode cool sur Bye Bye, en dépit de la puissance déjà à l’oeuvre, avant de monter en température sur le surpuissant I’m A Man, sur lequel sa voix se fait sentencieuse et impressionnante. On pourrait d’ailleurs citer les morceaux un par un et décortiquer leur canevas sonore tant l’ensemble des éléments sont inventifs et riches. Contentons-nous de mentionner The Believers pour ses boucles totalement folles et son rythme infernal avec encore une fois une voix totalement en symbiose. En termes d’expérimentation et d’accomplissement, « The Collective » est tout simplement une leçon de rock moderne et avant-gardiste qui pourrait bien faire des émules. Et si certains ont parfois été tentés de définir Kim Gordon comme « la femme de Thurston Moore » à l’époque où tous deux évoluaient ensemble à la scène comme à la ville, dénomination réductrice et un brin machiste, cette fois, plus possible de la réduire à un second rôle.