"> Michel Cloup Duo / Pascal Bouaziz - A la ligne - Chansons d'Usine - Indiepoprock

A la ligne – Chansons d’Usine


Un album de sorti en chez .

10

Merveille d'immersion, éclats de noirceur, beauté de la laideur.

A la ligne – feuillets d’usine est le premier roman de Joseph Ponthus paru courant 2019. Le roman dépeint la vision scrupuleuse, clinique de ce que l’on pourrait vulgairement appeler un « érudit », un homme plongé dans le monde de l’usine. A l’origine de sa transposition scénique, on retrouve une carte blanche donnée à Michel Cloup par La Station Service de Rennes. Assez ironique d’ailleurs de se dire qu’une carte blanche ait accouché d’un objet aussi noir…

Pour ce faire, Michel Cloup s’est adjoint, en plus de son groupe habituel, les services d’un illustre acolyte de la scène indé française en la personne de Pascal Bouaziz (Mendelson, Bruit Noir). Un Pascal Bouaziz qui nous a déjà gratifiés de sa vision du monde de l’usine .

De l’expérience scénique (hybride lecture, improvisation expérimentale), non sans rappeler Debout Dans Les Cordages de Zone Libre, a abouti cet album de fin d’année 2020 à l’image de l’introspection et de la distance que chacun aura pu expérimenter….

C’est froid, clinique non pas dans la description mais dans l’empathie que l’œuvre provoque. Il est vrai que, quoi de plus à propos que le monde de l’usine pour l’approche musicale de Michel Cloup et inversement ? Là est bien le sujet, c’est une immersion qui dépasse les mots, pourtant bien précis. « A la ligne – Chansons d’Usine » est avant tout une aventure sensorielle, où le texte est au service de la musicalité. Ce résultat est d’autant plus frappant lorsque l’on pense à la genèse du projet.

Répétitions, rythme lancinant, gimmicks comme une forme de temps suspendu, interminables, voilà les premiers éléments de langage du duo. Sans avoir pris le temps de s’imprégner de l’œuvre littéraire initiale, il nous est difficile de jauger de la distance prise avec le texte d’origine. Néanmoins on peut saluer cette aisance, déjà bien connue, des deux artistes à manipuler un vocable très cru, voire terre-à-terre, en lui conférant poésie, grandeur, sans jamais en dénaturer ses aspects premiers. « Museaux », « bouse » et même « tofu » sont autant de mots que bien du monde aurait du mal à intégrer dans une œuvre musicale sans s’y perdre… En l’occurrence, ce fameux corpus n’est pas l’arrangement mais le riff principal du texte. En cela, parler de performance serait se fourvoyer, d’autant plus que de telles notions, c’est bien pour les bureaux du haut, à l’usine. On évoquera plus des sèmes à la croisée de l’honnêteté, de la distance.

L’album se vit comme un documentaire, sensoriel avant tout, fait de la rencontre entre le son, et son pendant subliminal, le fait textuel, brut, simple et épuré. Musicalement, nous pourrions évoquer les approches indus, tantôt saturées tantôt noisy. A quoi bon, nous arrivons en terrain connu concernant les deux artistes. Le sujet n’est pas vraiment là. On n’écoute pas ce type de disque comme un  album de pop bien produit, on ne cherche pas l’arrangement bien senti, on écoute « A la ligne – Chansons d’Usine » comme une lecture accompagnée. En soit, la boucle est bouclée, comme la réalité crue sans apparat ou détour du monde de l’usine, cet opus remplit très cliniquement, encore une fois, son objectif.

 

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La disco de Michel Cloup Duo / Pascal Bouaziz