"> Arcade Fire - The Suburbs - Indiepoprock

The Suburbs


Un album de sorti en chez .

Entrer en studio en sachant qu’on ne peut en sortir qu’après avoir enregistré quelque chose de mémorable, sous peine de s’exposer aux quolibets de l’ensemble de la presse rock mondiale, n’est probablement pas chose facile ; on n’envie donc pas la position d’Arcade Fire. Maintenant porteurs du brassard bien encombrant de « dépositaire officiel de la […]

Entrer en studio en sachant qu’on ne peut en sortir qu’après avoir enregistré quelque chose de mémorable, sous peine de s’exposer aux quolibets de l’ensemble de la presse rock mondiale, n’est probablement pas chose facile ; on n’envie donc pas la position d’Arcade Fire. Maintenant porteurs du brassard bien encombrant de « dépositaire officiel de la flamme du ROCK (TM) » que les milliers de sélectionneurs de la critique ont choisi d’ôter à Radiohead (qui de toute façon trouvait le rock trop étroit et se verrait volontiers en sauveur du monde et / ou de l’univers), les Canadiens doivent à la fois côtoyer les mêmes hauteurs que sur leurs deux premiers albums et porter encore plus loin leurs ambitions artistiques.

Jusqu’ici, Win Butler et les siens avaient mené leur barque avec une estimable détermination en choisissant, après le son agressif, cathartique et rageur de « Funeral », de voguer vers l' »hénaurme », un rock total, hyperbolique, fait d’hymnes insensés et d’instrumentations à l’emphase permanente. On s’étonne donc, avec « The Suburbs », de découvrir qu’Arcade Fire a choisi cette fois de faire profil bas, de ne pas jouer la carte de la surenchère (une carte qui avait été crânement abattue par Radiohead à l’époque de « OK Computer » pour s’arracher au plancher des vaches). Parler d’ascèse serait probablement exagéré mais pour un groupe abonné aux refrains grand format, cette sobriété, même relative, étonne et intrigue : le groupe se rabat sur un mélange pop-rock assagi, beaucoup moins démonstratif que sur « Neon Bible » et choisit de s’attacher au concret, au quotidien, bref, comme le titre l’indique, aux banlieues (déjà « Funeral » nous parlait de Neighborhood).

« The Suburbs » est ainsi un disque qui pourra paraitre terne, effacé et qui provoque naturellement des réactions contrastées. « Neon Bible » avait marqué une vraie ambition de la part d’Arcade Fire : avec des orchestrations pharaoniques et des compositions ampoulées, ce second album allait bien dans le sens de ce que l’on attendait de ce groupe qui avait bâti sa toute jeune renommée en grande partie sur des prestations live enflammées, roboratives, foisonnantes. On peut alors se demander si le choix d’Arcade Fire est de battre en retraite, de rallier les rangs d’un rock adulte mainstream et prédigéré, ou bien au contraire de choisir, toutes ambitions gardées, de nouvelles options. Avoir délibérément choisi le petit bout de la lorgnette, pour un groupe aussi naturellement porté vers l’excès, pourra se lire comme un aveu de faiblesse ou comme une preuve de courage selon les cas. On opte pour notre part pour le second choix. Osons alors une hypothèse : avec ce son grisâtre, ces mélodies uniformes, ces chansons parfois aussi interchangeables que des maisons Phénix, Arcade Fire offre simplement la meilleure évocation de l’enfer des banlieues de classe moyenne depuis la B.O de « Virgin Suicides » par Air. Ce disque n’est donc pas aimable, de la même façon qu’il serait difficile de prétendre que naviguer sans GPS dans les rues de Montigny-le-Bretonneux est agréable… Mais il est très loin d’être raté.

On pourra lui reprocher quelques longueurs, indéniables malgré quelques accès de fièvre comme Empty Room ou Suburban War. En revanche, cet aspect monotone, monochrome, cache des morceaux à l’écriture irréprochable. De la sophistication, on en trouve, de la signature rythmique décalée de Modern Man (qui en fait toute la saveur) aux morsures de guitare qui lacèrent le coda final de We Used To Wait en passant par les arpèges de Suburban War. La première moitié de l’album, l’air de rien, aligne les titres de très haute classe. Si l’on accepte les longueurs de la seconde partie, non comme des preuves de faiblesse mais comme les conséquences nécessaires du projet (ce qui nécessite un peu de bonne volonté, on l’accorde), « The Suburbs » prend une ampleur inattendue au fil des écoutes. Certes, pour un groupe de la trempe d’Arcade Fire, se réjouir du triomphe de l’uniformité et de la sobriété étonne quelque peu – et l’on n’est pas forcé d’adhérer à ce discours. Toutefois, quoique l’on pense de cette évolution il faut reconnaître que « The Suburbs » reste un excellent album de rock teinté de new-wave. On aimerait croiser une telle qualité d’écriture plus souvent ; qui plus est Win Butler y démontre qu’il peut s’exprimer avec pertinence sur d’autres registres que ceux que l’on connaissait déjà ; c’est loin d’être anodin.

Chroniqueur

Tracklist

  1. The Suburbs
  2. Ready to Start
  3. Modern Man
  4. Rococo
  5. Empty Room
  6. City with No Children
  7. Half Light I
  8. Half Light II (No Celebration)
  9. Suburban War
  10. Month of May
  11. Wasted Hours (A Life We Can Live)
  12. Deep Blue
  13. We Used to Wait
  14. Sprawl I (Flatland)
  15. Sprawl II (Mountains Beyond Mountains)
  16. The Suburbs (continued)
  17. Culture War
  18. Speaking in Tongues (feat. David Byrne)

La disco de Arcade Fire

70%

Reflektor

Everything Now5
50%

Everything Now

0%

The Suburbs

0%

Neon Bible

90%

Funeral

EP
0%

EP