Le troisième véritable album de FKA Twigs, toujours entre avant-garde et séduction.
Cela fait maintenant plus de dix ans que l’on sait à quel point Tahliah Barnett, alias FKA Twigs, est une artiste importante. Pour sa capacité à allier tous les medias à sa disposition, de la musique à l’image en passant par la danse, pour sa capacité surtout à dresser un pont entre une exigence musicale totale, avec toujours une bonne dose d’expérimentation, et une prédisposition pour des genres qui trustent les charts tout en manquant souvent précisément d’audace. Tahliah Barnett est aussi quelqu’un d’important en tant que personnalité puisqu’elle incarne une féminité totalement assumée, y compris sur le plan sexuel, sans tomber dans l’archétype de la femme objet. A l’inverse, elle incarne à merveille une personnalité libre, indépendante, créative, pleine de caractère et totalement aux manettes de sa vie. Après la période difficile qu’elle a vécue, sur le plan physique et sentimental et magnifiquement illustrée par son second album « Magdalena » en 2019, FKA Twigs s’est montrée prête à repartir de l’avant, d’abord via « Caprisongs », une mixtape spontanée et légère, qui ne manquait toutefois pas d’intérêt en 2022, et ce troisième véritable album cette année.
Le titre de l’album, néologisme immédiatement entré dans le langage courant dans les pays anglo-saxons, est l’expression parfaite de son état d’esprit puisqu’il combine les mots « euphorie » et « sexualité » et, selon son auteure, désigne le sentiment d’euphorie et de bien-être intérieur qu’une sexualité épanouie, notamment, mais également la méditation ou encore la danse, peuvent provoquer. A l’écoute d »Eusexua », il faut d’ailleurs s’arrêter sur cette mention de la danse comme moyen d’atteindre l’euphorie. La musique électronique tient en effet une place centrale dans la musique de FKA Twigs et c’est tout naturellement que ce nouvel album s’inscrit dans la tendance de l’année écoulée, à savoir que la musique électronique a renoué avec sa culture club sans revenir en arrière et abandonner sa fibre avant-gardiste. FKA Twigs était dans cette dialectique un peu en avance sur les autres et, quelque part, « Eusexua » pourrait être vu comme le moment où la Britannique vient récolter le fruit de ce qu’elle a semé depuis dix ans.
Ne pas oublier enfin que FKA Twigs possède une voix à la fois cristalline et malléable qu’elle module à la perfection pour donner un supplément d’âme et d’incarnation à sa musique. Sur « Eusexua », il suffira d’une écoute de Wanderlust pour se rendre compte que ses capacités en la matière sont là encore bien au-dessus de la moyenne. Ailleurs, sans emphase ni surenchère, de Perfect Stranger à Striptease, elle accompagne toutes les inflexions de ses morceaux tortueux et sensuels à la perfection. En rassemblant tous ces éléments, on obtient un disque mine de rien exigeant, très loin d’être une machine à danser évidente, toujours créatif, qui se révèle par petites touches. Striptease est ainsi d’abord langoureux, puis accrocheur sur son refrain puis finit par se transformer en petite bombe drum’n’bass. Girl Feels Good et Perfect Stranger adoptent une fibre plus pop, puis Drums Of Death embrasse les atours d’une electro plus radicale avant encore une fois de laisser place à un refrain immédiatement évident. En résumé, « Eusexua » est un parfait condensé de son époque et de ce que FKA Twigs a mis en place depuis ses débuts. Un album dense, long en bouche, séduisant, encore une fois propre à ravir toutes les chapelles.
- Publication 1 189 vues24 janvier 2025
- Tags FKA twigsYoung Recordings
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