Abîmes sublimes et doigts d'or, Gontard! se fend d'un réel chef d'oeuvre de 2018.
Ils sont tellement nombreux les héritiers de Diabologum qu’on pourrait presque en faire un style à part entière… Alors, non, Gontard! n’est pas le seul représentant de la fratrie, mais « Tout Naît Tout S’Achève Dans Un Disque » nous offre tout de même une de ses meilleures expressions. Ceci pour une bonne et simple raison, toujours la même, l’émancipation…
« Repeupler » nous avait déjà sensibilisé à ce qui sera la force première de l’opus : l’orchestration. Là où nombre de ses compagnons d’aventure s’échinent à l’épuration, au synthétisme et à la saturation (bien proche de la figure tutélaire), notre ami lui, répond cuivres, instruments à vent, percussions… Nulle boîte à rythme à l’horizon, comme seuls claviers, des pianos, clavecins (?)… à de rares exceptions prêts, Gontard! choisit la réincarnation. A l’écoute par exemple de L’Ostalgie, le puriste de Michel Cloup and Co. crierait au scandale. Le disque est réellement traversé par une ambition orchestrale plus proche d’un Nick Cave que d’un Arnaud Michniak.
Si La Main Tiède De La Violence, garde notre préférence certainement pour sa rage sous-jacente, ce disque regorge d’une richesse indéniable en termes de compositions et d’ambiances, ne serait-ce qu’à en juger par l’enchaînement du morceau sus-nommé avec le très sucré Singapour.
Alors beaucoup seront pour le moins déstabilisés par le phrasé et les thèmes abordés, Intimidation par exemple aborde originalement un sujet très rarement traité. Pour ce qui est du chant, c’est bien là que l’on ressent la filiation à Diabologum : spoken-word, voix fébrile (the voice, c’est pas pour lui) accompagnent les compositions de l’artiste. Il y a clairement un temps d’adaptation à cela côté auditeur, mais quel meilleur écrin à scander des paroles du genre « des cadavres de manifestants travaillent, travaillent, travaillent… » (cf Vivres)
Nous aurons, sur « Tout Naît Tout S’Achève Dans Un Disque », retenu la qualité de la composition, quand la variété déjà repérée chez Gontard! est devenue plus consistante. Le titre éponyme qui conclut l’album saura presque résumer tout cela, avec ses envolées de cuivres sur des bases très synthétiques. Aussi, la qualité des paroles, nous ramenant autant à l’écriture instinctive de Bruit Noir qu’à la poésie du quotidien d’un Michel Cloup ou à certaines formules macabres d’un Rhume, aura pour le moins fait résonner notre fibre littéraire. Mais avant tout, bien qu’un titre nous ait particulièrement marqué, les quatorze morceaux de cet album sont tous sans exception de vraies grandes et belles chansons, jamais faciles et toutes prenantes. Ce que l’on soupçonnait à l’écoute de « Repeupler » ou de Travail prend clairement des airs de maîtrise avec cet opus qui mérite toute la considération du monde dans un mois de mars où l’indé français n’attend que Dominique A ou Feu! Chatterton.
- Publication 1 926 vues2 mars 2018
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Tracklist
- Il fiasco
- La main tiède de la violence
- Singapour
- Parkinson
- Alerte enlèvement
- Fin de concession
- Notre maison
- Real Doll
- Arcade Fire
- Lettre d'amour à ma dernière poupée
- Ostalgie
- Intimidation
- Vivres
- Tout naît - Tout s'achève dans un disque