Après une collection de reprises d'une infinie justesse sortie deux ans plus tôt ("I'll Take Care Of You"), l'ex-leader des Screaming Trees revient aux affaires en 2001 avec un bien beau disque de blues à l'élégante signature vocale, dans le digne prolongement de l'effort passé.
Après une collection de reprises d’une infinie justesse sortie deux ans plus tôt (« I’ll Take Care Of You »), l’ex-leader des Screaming Trees revient aux affaires en 2001 avec un bien beau disque de blues à l’élégante signature vocale, dans le digne prolongement de l’effort passé.
Il faut reconnaître au monsieur deux qualités: la première, parvenir à peser et habiller chaque mot de ses plus belles réussites pour y restituer intentions et émotions, émotion d’un amour foutu confessé dans une longue plainte rauque et déchirante sur guitare-piano (Don’t Forget Me) ou intention de jouer avec les métaphores de la détresse (One Way Street), dont nul ne saurait sonder le fond sans y laisser un peu de sa personne (« You can’t get, can’t get it down without crying »). L’atmosphère globalement acoustique des morceaux (l’hypnotique Resurrection Song) donne donc tantôt envie de fredonner doucement mains dans les poches (son timbre barbe-de-trois-jours est une véritable caresse sur Kimiko’s Dream House), tantôt envie de pester en flanquant un grand coup de pompe dans une boîte de conserve.
La deuxième, le monsieur n’a jamais cessé au gré de ses moults projets de s’entourer de talentueux musiciens pour ses disques solos: Mike Johnson, ex-Dinosaur Jr et ami des premiers disques à la guitare sur 8 titres, Chris Goss aux choeurs sur la courte She Done Too Much ou Duff McKagan ex-Guns N’ Roses aux fûts sur la délétère complainte Fix clôturant l’album. En résultent des chansons moins acoustiques où le timbre de Lanegan atteint des graves somptueux (Field Song) ou amenant l’artiste à tenter même un énigmatique morceau instrumental (Blues For D) avec l’appui de Ben Shepherd (bassiste de Soundgarden).
Sur le plan lyrics, rarement l’ours tatoué aura ouvert son coeur avec autant de poésie et de tendresse pour évoquer un amour perdu (la lumineuse Pill Hill Serenade et son orgue plein de nostalgie). Mais son lugubre versant n’étant jamais très loin, le fond d’un verre plein de compréhension s’offre à ses fêlures gémissantes (Don’t Forget Me) quand ce n’est pas la promesse d’une renaissance hallucinée (Fix) un garot sur la veine.
En résumé, bien qu’effectivement d’avantage éloigné de l’acoustique de ses trois premiers disques mais toujours aussi mélancolique (en témoigne le packaging couleur sépia représentant l’homme tout de noir vêtu regardant le sol, pensif), c’est là un album touchant, écrit et interprété avec justesse, à la production soignée. Les tranches de vie tortueuse et les excès multiples y côtoient des prières adressées à Dieu et des visages de femmes. On en redemande.
A noter: « Kimiko’s Dream House » fut écrite en collaboration avec feu son ami Jeffrey Lee Pierce (frontman du Gun Club décèdé en 1996, ndlr)
- Publication 953 vues25 mars 2013
- Tags Mark LaneganBeggars Banquet
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Tracklist
- One Way Street
- No Easy Action
- Miracle
- Pill Hill Serenade
- Don't Forget Me
- Kimiko's Dream House
- Resurrection Song
- Field Song
- Low
- Blues For D
- She Done Too Much
- Fix