Fidèle à son rythme d'un album tous les six ans, le groupe prodige allemand est de retour sur les platines. Evènement garanti.
Naïvement, en 2008, à la sortie de « The devil, You + Me », on pensait avoir affaire à un come-back inespéré, les membres de The Notwist ayant fait parler d’eux en ordre dispersé, mais pas ensemble depuis l’épatant et inépuisable « Neon Golden » de 2002, un album aujourd’hui devenu un classique des années 2000, ce qui pouvait légitimement accréditer la thèse que le groupe peinait à lui donner un successeur digne de ce nom. La réussite insolente de « The Devil, You + Me » avait alors pu nous faire dire que Markus Acher et ses copains avaient bien fait de prendre leur temps. Cette fois-ci, on a compris, on ne se laisse plus avoir : The Notwist, désormais, c’est un album tous les six ans. Point. Bien sûr, on peut trouver frustrant qu’un groupe de cette trempe ne soit pas plus prolifique mais, d’une part, ce n’est pas de la paresse puisque les projets parallèles des uns et des autres sont nombreux et, secundo, à l’aune de ces fameux projets, les albums de The Notwist ont quelque chose de magique. Car si leurs travaux parallèles ne sont pas sans intérêt, le projet 13&God notamment, dans lequel s’est illustré Markus Acher, quand la troupe se retrouve, c’est un bon cran au-dessus. C’est d’autant plus étonnant qu’après avoir tâtonné sur ses premiers albums, The Notwist s’est affirmé avec « Neon Golden » comme un grand groupe pop. De fait, une lecture trop rapide de leur musique pourrait laisser penser que les membres du groupe ont décidé de réserver complexité et expérimentation à leurs projets parallèles et d’aller vers plus de simplicité quand ils se retrouvent. Sauf que réussir un grand album de pop, c’est parvenir à faire en sorte que tout paraisse évident et immédiat en surface, même si c’est le résultat d’une longue gestation, d’un gros travail sur les textures, les ambiances, les arrangements, ce que n’a jamais complètement réussi un groupe comme Grizzly Bear, par exemple, à la cérébralité trop prégnante.
« Close To The Glass », une fois encore, accomplit ce miracle. La recette est globalement la même et on retrouve un mélange de mélodies catchy sur des arrangements où se mêlent avec bonheur guitares et sonorités électro. Mais The Notwist évite sans peine l’écueil de la redite en tissant un canevas sonore toujours changeant, dense et riche. Et en terme de canevas sonore, Martin Greitschmann, alias Console, s’y entend et s’en donne à coeur joie. Tantôt en ressortant ses synthés vintage qui font blip blip sur Signals, ailleurs en usant avec maestria de l’art de la boucle sur In Another Tune, et en se voyant offrir pour services rendus (c’est une façon de parler bien sûr) la possibilité de triturer et d’entremêler à de savantes percussions quelques accords de guitare sur le long et planant instrumental Lineri. Le reste du temps, les frères Acher s’amusent à gratter quelques accords de guitare garage sur Kong, petite bombe indie-pop fédératrice savamment lancée en éclaireur ou de glisser une touche noisy pop sur le génial 7-Hour Drive. Ces titres révèlent une autre facette de la richesse de « Close To The Glass », à savoir se jouer des époques et des styles. Car l’histoire de la musique est faite de bons en avant et de coups d’oeil dans le rétro, et chaque époque est marquée par l’émergence de groupes et artistes dont le son et l’esthétique revisitent ce qu’on pouvait entendre dans les décennies précédentes. Encore une fois, peut-être est-ce le privilège de laisser passer de nombreuses années entre chaque album, mais The Notwist, plutôt que revisiter une époque, use de la citation (ne pas oublier que le groupe s’est formé en 1989), tire le meilleur de chaque époque et passe avec une facilité toujours aussi bluffante de titres enlevés (Close To The Glass, Kong, 7-Hour Drive) à de superbes ballades, au premier rang desquelles le vaporeux From One Wrong Place To The Next, et le sobre et soigné Steppin’In, sur lequel on entend un banjo et des cordes, rien que ça… Un dicton veut que par définition ce qui est précieux soit rare. Précieux et rares, deux adjectifs qui définissent bien les albums de The Notwist.
- Publication 955 vues26 février 2014
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