"> Top IPR 2015 : Le Podium - Indiepoprock

Top IPR 2015 : Le Podium

Voici donc, au terme de notre traditionnel bilan de fin d’année, venu le moment de dévoiler les trois albums qui, au sein de notre rédaction, ont obtenu le plus de suffrages. Evidemment, un Top de fin d’année est un exercice extrêmement subjectif, qui ne détient aucune vérité. Néanmoins, on avoue être plutôt fiers de notre podium, dans le sens où les artistes qui y prennent place nous semblent parfaitement en phase avec leur époque.

Sur la troisième marche, on retrouve une jeune femme qui, en dépit de sa courte carrière, est déjà une habituée des places d’honneur dans les bilans de fin d’année et devrait logiquement s’y retrouver encore à l’avenir, on a cité FKA Twigs. Certes, en 2015 la nouvelle reine du R’n’B atypique a « seulement » édité un EP au titre improbable, M3LL155X. Et pourtant, en cinq titres à la créativité débridée, la londonienne a livré une nouvelle preuve de son incroyable talent. Rythmes triturés, mélodies qui bifurquent en milieu de morceau sans jamais  patiner, refrains assassins, textes effrontés, tout y est. En outre, « M3LL155X » est plus qu’un EP habituel puisque les cinq morceaux qui le composent sont réunis dans une longue vidéo magnifique, véritable manifeste plastique, esthétique et même politique tant FKA Twigs assume sa liberté d’artiste et de femme qui brandit comme autant d’étendards sa sensibilité et sa sexualité. Artiste complète qui manie avec brio le son et l’image, qui va de l’avant sans se poser de questions métaphysiques, on tient avec elle la quintessence de notre époque.

Sur la seconde marche, on retrouve un jeune homme qui partage pas mal de points communs avec celle dont on vient de parler. Jamie XX, puisqu’il s’agit de lui, est lui aussi un habitué des tableaux d’honneur en dépit d’une carrière encore relativement courte, à la différence près que, jusque-là, c’était en compagnie de ses comparses de The XX, dépositaires de deux beaux albums dont Jamie était le responsable de la « patte » sonore. Suite à la publication de « Coexist », le second album du groupe, le rôle de Jamie était ressorti de manière plus prégnante, au point qu’on avait commencé à le solliciter pour quelques remixes et qu’il avait également sorti quelques singles qui, logiquement, l’ont amené à la sortie de son premier album solo cette année, In Colour. Edité par Young Turks, le label qui abrite également FKA Twigs (puisqu’on vous disait qu’il y avait des points communs), ce premier album solo, sans renier son travail avec The XX (Oliver Sim et Romy Madley Croft sont d’ailleurs tous deux présents sur le disque pour poser leurs voix) porte bien son nom, élargit la palette des ambiances et donne à voir en grand toutes les facettes de son auteur. Son goût pour une electro doucement mélancolique et urbaine cohabite ainsi avec de vrais rayons de soleil, au gré d’une intervention d’un Young Thug, ou de mélodies ouvertement funky. Bref, là encore, on tient un album parfaitement en phase avec son temps, libre, éclectique, inventif sans chercher à être à l’avant-garde à tout prix.

Enfin, on traverse l’Atlantique pour aller à la rencontre de notre reine de cette année 2015, reine de la nuit s’il en est, Chelsea Wolfe. On est d’autant plus fiers de la porter au sommet qu’en France, pas mal de monde la snobe ou l’ignore. Par choix « institutionnel » (la distribution de ses disques chez nous est aléatoire), parce qu’on la cantonne au rayon metal, pour d’autres raisons plus obscures… Mais plutôt que faire des procès aux autres, reconnaissons que la carrière de la californienne a pris un sacré coup d’accélérateur depuis 2013 et la sortie de « Pain Is Beauty ». Avec cet album, Chelsea Wolfe élargissait spectaculairement son spectre musical, en alliant à ses ambiances gothiques une dramaturgie, un lyrisme et une virtuosité d’écriture de haute tenue. 2015 s’annonçait donc pour elle comme l’année du quitte ou double et, avec Abyss, le clou est définitivement enfoncé. Album cathartique dans lequel l’Américaine conjure ses cauchemars, album cathédrale aux mélodies belles à pleurer mais où les guitares sont tranchantes comme des lames de rasoir, album du foisonnement où l’emphase du doom metal rencontre des boucles métronomiques ou des cordes de violon, album de l’avènement d’une chanteuse immense, sa place ne pouvait être ailleurs.

Trois albums, trois singularités, trois artistes libres débarrassés des carcans. 2015 n’a pas été une année joyeuse à tous points de vue, très loin de là, mais une fois encore, c’est par la musique qu’on se réconciliera avec elle.

Le Podium :

  1. Chelsea Wolfe « Abyss »
  2.  Jamie XX « In Colour »
  3. FKA Twigs « M3LL155X »
Rédacteur en chef